01 . Joseph MARZIN, recteur de Guissény (1891-1915)

Joseph MARZIN devient recteur de Guissény en 1891 à la suite de François Gourc’hant.

Joseph MARZIN

Joseph MARZIN est né le 19 juillet 1842 à Plogoff, fils de Joseph Marzin, cultivateur, et de Marie Yvonne Marzin, cultivatrice, qui s’étaient mariés le 18 septembre 1824 à Plogoff. Il était le dernier d’une famille de neuf enfants.

MarzinJoseph°1842

. Il est ordonné prêtre en 1867 et nommé vicaire à Brasparts.

. En 1872, il est nommé vicaire à Treffiagat.

. En 1874, il est nommé vicaire à Plomeur.

. En 1880, il est nommé recteur de Saint-Thois.

. En 1885, il est nommé recteur de Plourin-Les- Marlaix.

. En 1891, il devient recteur de GUISSENY.

. Il est décédé le 16 septembre 1915 au presbytère de Guissény.

MarzinJoseph+1915

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Homélie lors de ses obsèques :

M. Joseph Marzin, recteur de Guissény, a rendu son âme à Dieu le 18 Septembre, dans la nuit. Né à Plogoff le 18 Septembre 1842, il était donc âgé de 73 ans moins deux jours. Le mal qui l’a emporté le minait sournoisement depuis plusieurs années et avait déjà déterminé des crises qui n’avaient pas été sans inspirer des inquiétudes à ses amis.

Avec M. Marzin disparaît une figure originale du clergé finistérien, et nul de ceux qui l’ont connu ne pourra l’oublier. Ennemi de l’étiquette, il recevait ses confrères avec la plus franche cordialité et animait les réunions par sa verve et son entrain. Il était d’aspect sévère, mais sous cette rude écorce battait un cœur d’or, et, malgré les apparences, c’était plutôt un timide et un doux. Pour l’aimer il suffisait de le connaître. Plus que tous les autres, peut-être, les séminaristes de sa paroisse ont pu apprécier son grand cœur : pour eux sa générosité n’avait pas de bornes.

Durant sa longue carrière, M. Marzin a été successivement vicaire à Brasparts, Treffiagat et Plomeur, puis recteur à Saint-Thois, Plourin-Morlaix et Guissény. Partout il a laissé le souvenir d’un prêtre zélé, tout à son devoir, ne reculant devant aucun sacrifice quand il s’agissait de l’intérêt des âmes. A Brasparts, où il se prodigua pendant une épidémie qui fit beaucoup de victimes, il contracta une maladie qui le força à quitter pour quelque temps le ministère. Aussitôt rétabli, il se remit au travail, il se distingua dans le ministère de la prédication. Ses instructions, toujours bien préparées et données avec feu, émouvaient et remuaient les âmes : il fut un prédicateur breton de premier ordre.

A Guissény, où il a passé les vingt-cinq dernières années de sa vie, il a su s’adapter, dès le premier moment, aux besoins de la population qui lui était confiée. De bonne heure, tous les matins, on le voyait se rendre à l’église et, sa messe dite, se diriger vers son confessionnal, où toujours des pénitents l’attendaient : des hommes, des enfants. Ce n’est pas quelquefois, c’est tous les jours de l’année ou à peu près, les jours ordinaires comme le dimanche, qu’il avait ce ministère à remplir. Il poussait ses paroissiens à la réception fréquente des sacrements et ainsi il a gardé très forte la vie religieuse à Guissény.

On n’a pas oublié de quelle façon miraculeuse il fut sauvé, en 1905, de la fureur de l’Océan. La Sainte Vierge, pour laquelle il avait une grande dévotion, jeta sur lui son manteau tutélaire, voulant qu’il travaillât dix ans encore dans sa chère paroisse de Guissény.

Et en effet, il a travaillé depuis ! La magnifique école chrétienne de filles est son œuvre. Selon le précepte de l’Évangile, la main gauche doit ignorer ce que donne la main droite. Dieu seul voit quelle somme M. Marzin a su prélever sur ses ressources personnelles pour la construction et l’entretien de cette école. Aussi ses paroissiens, reconnaissants, béniront sa mémoire. Il a déjà été récompensé dès ce monde, car il avait le bonheur et l’honneur de voir accourir à l’école chrétienne toutes les enfants de sa paroisse. Mais cette œuvre lui comptera surtout près de Dieu. « Opera enim illorum sequuntur illos. »

Un bon et saint prêtre, pieux et zélé, l’homme du devoir toujours, tel a été M. Marzin, et nous aimons à croire qu’il a déjà entendu les paroles consolantes par lesquelles Dieu accueille ses fidèles serviteurs. « Euge serve bone el fidelis, intra in gaudium Domini tui. »

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Une tragique partie de pêche :

Le 3 août 1905, jour de grande marée, Joseph Marzin,le recteur de Guissény, accompagné de 4 prêtres guisséniens en vacances dans leur paroisse natale, quitte son presbytère pour une partie de pêche à la crevette sur l’îlot de Lok-Karreg, en face de la pointe de Neiz-Vran en Kerlouan.

Les 4 prêtres qui accompagnaient le recteur étaient : le chanoine Uguen, supérieur du petit séminaire de Saint Vincent et professeur à l’école Saint-Yves à Quimper, M. Prigent, un nouveau prêtre, M. Le Gall, sous-diacre, et M. Salou, séminariste. Trois d’entre eux ne reviendront à Guissény que treize jours plus tard après une aventure rocambolesque, qui est toujours présente dans la mémoire de plusieurs Guisséniens.

Ils font une bonne pêche sur leur îlot, puis reprennent leur canot pour rentrer à la côte lorsqu’une tempête se lève. Ils ne peuvent franchir le détroit en ramant contre le courant et le vent, et ils décident de regagner Lok-Karreg pour ne pas être entraînés au large. Deux d’entre eux réussissent à débarquer sur les rochers et à mouiller deux ancres pour fixer le bateau aux deux extrémités. Il conseillent aux trois autres de quitter la barque et de les rejoindre sur les grands rochers qui ne sont jamais entièrement recouverts par la mer, mais ceux-ci ne les suivent pas.

La tempête se déchaine et le bateau est secoué dans tous les sens ; les cordes frottent contre les rochers et finissent par se rompre, le canot est poussé vers le large. Le recteur utilise une rame pour godiller et diriger la barque au milieu des rochers tandis que les deux autres rament autant qu’ils peuvent. Ils se retrouvent en pleine mer dans une petite barque d’à peine cinq mètres de long, mais ils ont réussi à ne pas chavirer. Exténués par leurs efforts, ils laissent aller leur bateau au grès du vent, se contentant de godiller un peu pour ne pas être pris de travers par les lames, entraînés vers le nord et disparaissant progressivement aux yeux de leurs deux compagnons restés sur le rocher.

Ceux-ci doivent aussi s’occuper de leur propre sort car la mer continue à monter et ils reçoivent des paquets d’écume de tous les côtés. Après une longue heure de lutte, la houle devient moins violente, c’est le reflux qui commence. Ils sont sauvés mais trempés et gelés car le vent souffle toujours aussi fort et ils sont persuadés que leurs trois compagnons ont été engloutis par la tempête. Toute la nuit, ils font des exercices de gymnastique pour résister au froid. Ils n’osent pas sortir de l’île à la basse mer au milieu de la nuit car ils n’ont plus aucune repère, leurs montres s’étant arrêtées. Mais ils en profitent pour changer de refuge et aller s’installer sur un autre rocher plus élevé à l’ouest de l’île où ils délogent une colonie de cormorans pour prendre leur place.

Aussi les premiers secours, avertis par des enfants qui gardaient les vaches sur la dune et venus à marée basse, les cherchent-ils vainement à l’endroit de leur premier refuge et repartent sans les avoir trouvés et sans s’être fait remarquer par eux. Au lever du jour, ils peuvent se faire repérer par des hommes qui observent les rochers avec des longues-vues. Vers dix heures du matin, huit hommes mettent un bateau à l’eau et viennent les récupérer sur leur rocher. Ils sont accueillis par des parents en larmes et de nombreux Guisséniens et Kerlouanais rassemblés sur la dune. Tout le monde est persuadé que leurs trois compagnons ont péri dans la tempête.

Ce n’est que le lendemain matin que la bonne nouvelle arrive sous la forme d’une dépêche transmise par la Préfecture Maritime de Brest et communiquée par le sémaphore de Kérisoc, en Plouguerneau : "4 août - 3h45 soir - sémaphore du Créac’h, Ouessant - Vapeur espagnol Aurrera, de Bilbao, venant du Nord-Est, route Sud, signale avoir recueilli ce matin embarcation et trois prêtres français - Lui avons demandé à quel endroit - Il a répondu à Guissény". Le bateau espagnol se dirige vers Gênes pour livrer du charbon anglais.

Les trois prêtres avaient réussi à maintenir leur barque à la surface de l’eau malgré les lames qui la ballottaient, vidant tant bien que mal l’embarcation à l’aide de leurs sabots. C’est à six heures et demie qu’ils aperçoivent un bateau et lui font des signaux en attachant un mouchoir à un haveneau et agitant une rame. En fait, ils ont déjà été repérés par l’officier en second du bateau qui est de quart à la passerelle. Le commandant fait approcher le bateau et l’équipage lance des bouées. Après quelques manœuvres difficiles, un marin espagnol saute dans leur barque et organise le transbordement. Les prêtres reçoivent du café chaud, des habits secs, puis des cabines pour se reposer.

Le 14 août, ils arrivent à Gênes où ils sont accueillis par le Vice-Consul de France qui leur apprend que leurs deux compagnons ont bien été sauvés. Ils quittent leurs sauveteurs avec émotion et le vice-consul les conduits chez un marchand de soutanes. Celui-ci les conduit à la gare le lendemain et ils arrivent à Paris le 16 août au matin, puis à Landerneau avant la nuit. Ils sont conduits en voiture à Guissény où ils arrivent à 10 heures du soir. Au mois de septembre, tous les cinq participent au pèlerinage de Lourdes.

(d’après le récit du chanoine Uguen)

02 . Nicolas Jean François SIMON, recteur de Guissény (1915-1939)

Nicolas Jean François SIMON devient recteur de Guissény à la suite de François Gourc’hant.

Chanoine Simon

Nicolas Jean François SIMON est né le 25 août 1860 à Kerdilizien au Drennec, fils de Tanguy Simon et Marie Jeanne Yvonne Jacopin qui s’étaient mariés le 7 juillet 1859 au Drennec. Il était l’ainé d’une famille de sept enfants.

. En 1885, il est ordonné prêtre et nommé vicaire à Sibiril.

. En 1887, il est nommé vicaire à Cléder.

. En 1904, il est nommé recteur de l’Ile-Tudy.

. En 1906, il est nommé recteur de La Forest-Landerneau.

. En 1915, il devient recteur de Guissény.

. En 1935, il est nommé chanoine honoraire.

. En 1939, il se retire à la maison Saint-Joseph.

. Il est décédé le 27 septembre 1941.

SimonNicolas+1941

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L’œuvre de Nicolas SIMON dans la paroisse de Guissény.

Chanoine2

. La restauration de l’église

. Des réparations à la chapelle de l’Immaculée Conception (dans le cimetière) et à la chapelle de Brendaouez.

. L’installation de la croix de Saint-Yves dans le cimetière pour en faire une croix de mission de 1920.

. L’entretien des croix sur le territoire de la paroisse.

. L’entretien des fontaines.

. La création de l’école du Sacré-Cœur en 1922.

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Les noces d’or de Nicolas SIMON

Les fêtes jubilaires pour Nicolas SIMON se sont déroulées le 23 juillet 1935 pour célébrer les cinquante ans de prêtrise de l’abbé, recteur de Guissény depuis 20 ans.

Le charmant petit bourg de Guissény était, mardi matin, décoré et paré comme aux grands jours de fête. Partout des drapeaux, des oriflammes, des calicots portant des inscriptions élogieuses pour le pasteur de la paroisse. Presque toute la paroisse était assemblée au bourg en cette belle journée de fête. A 9h45, un cortège se forma à l’église et se rendit processionnellement au presbytère pour y accueillir le jubilaire. Ce dernier prit place sous le dais et la procession revint lentement par la rue pleine de soleil, vers le sanctuaire.

L’église était à peine assez spacieuse pour contenir la foule des assistants. M. le Chanoine Simon, demeuré étonnamment alerte malgré son âge, célébra la grand-messe qui fut précédée d’un service funèbre. L’harmonium était tenu par M. l’abbé Jaffrès, vicaire de Guissény, l’organisateur de la journée.

A l’Offertoire, M. le Chanoine Thomas, curé-doyen de Lannilis, monta en chaire et célébra éloquemment, en un breton très pur et très châtié, les mérites et les vertus du vénéré jubilaire. La cérémonie se clôtura par le salut du Saint-Sacrement.

Trois cents convives environ se réunirent ensuite autour des tables de l’école du Sacré-Cœur où le directeur, M. l’abbé Rannou, avait préparé un excellent menu, très bien servi par les élèves de l’établissement. Le repas se déroula dans une atmosphère de saine gaieté et d’extrême cordialité.

Menu : Apéritif « Epheta » - Salade de tomates, sardines d’argent, maquereaux de rade, parmentier « à l’huile », filets de harengs - Jambon d’York à la gelée - Homards de « Neiz-Vran » - Noix de veau à la « Christophe » - Poulet de grains rôti - Haricots « Glaz », laitue - Moka, corbeille de fruits - Café. Les vins : blanc, rouge, Bordeaux, Bourgogne, Champagne, Fine.

03 . Joseph CADIOU, recteur de Guissény (1939-1942)

Joseph CADIOU devient recteur de Guissény en 1939 à la suite de Nicolas Simon.

Joseph Cadiou

Joseph CADIOU est né le 2 septembre 1886 au bourg de Plouescat, fils de Hervé Cadiou, cultivateur, et de Marie Thérèse Appéré qui s’étaient mariés le 7 octobre 1885 à Plouescat.

CadiouJoseph°1886

. Il fait ses études au collège du Kreisker à Saint-Pol-de-Léon.

. En 1912, il est ordonné prêtre, et nommé surveillant, puis professeur à Saint Vincent.

. Il participe à la 1re Guerre Mondiale (1914-1918 ).

. En 1919, il est nommé vicaire à Saint-Corentin, Quimper.

. En 1939, il devient recteur de GUISSENY.

. En 1942, il est nommé curé de Plabennec.

. En 1945, il devient vicaire général et chanoine honoraire.

. En 1958, chanoine titulaire et en décembre 1958, doyen du chapitre cathédral .

. Il est décédé le 2 mars 1980 à Quimper.

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La carrière militaire de Joseph CADIOU

Joseph Cadiou militaire
Fiche matricule

. Conseil de Révision : affecté au 106e Régiment d’Infanterie. . Signalement : cheveux et sourcils châtains ; yeux bleus et font ordinaire ; nez et bouche moyens ; menton rond et visage ovale ; taille = 1m71 ; degré d’instruction = 5.

. Promu sous-lieutenant, puis lieutenant au 19e RI ; officier de renseignements, agent de liaison.

. Croix de guerre et Chevalier de la Légion d’honneur le 30 mars 1923.

. Cinq citations :

  • 1re citation (Ordre de la Brigade) : “Officier d’un dévouement et d’un zèle inlassables. Dans un secteur perpétuellement soumis à un violent bombardement, a, pendant deux périodes successives, assuré les services extérieurs du régiment et a fait des reconnaissances très périlleuses, avec une bravoure simple au dessus de tout éloge”.
  • 2e citation (Ordre de la Division) : “ Officier de renseignement, s’acquitte de ses fonctions avec un zèle et une compétence digne des plus grands éloges. Dans un secteur d’attaque, durant dix jours (avril 1917), n’a cessé de provoquer, de recueillir et de contrôler les observations qui ont renseigné le commandement avec précision et exactitude ; aux heures les plus critiques du combat, a fait preuve d’un courage qui n’a d’égal que sa sérénité et sa modestie.
  • 3e citation : “ Officier de renseignements d’une haute valeur morale, homme de devoir, consciencieux, modeste. Le 27 mai 1918, n’a quitté son poste que sur l’ordre de ses chefs, alors que l’ennemi y avait déjà pris pied et que le feu des mitrailleuses en balayait les abords. A aidé à l’organisation du pont de B… et C… et n’a cessé d’être un précieux auxiliaire pour le capitaine commandant provisoirement le régiment, dans la direction des éléments privés de leurs chefs et la réorganisation des services du corps. ”
  • 4e citation (Ordre du Corps d’Armée) : “ Officier de haute valeur morale. Au cours des combats du 24 au 28 mars 1918, s’est rendu sous le feu, aux endroits les plus exposés, pour porter les ordres, donnant à tous l’exemple de l’abnégation et du mépris du danger. ” 5e citation (Ordre de la Division) : “ Officier de la plus grande valeur. Auxiliaire précieux du chef de corps. Pendant les combats du 26 septembre au 12 octobre, a fait de nombreuses reconnaissances, accomplissant toutes les missions dont il était chargé, avec sa sérénité et sa modestie coutumières ”.

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Les obsèques de Joseph CADIOU le 4 mars 1980

Les obsèques de M. le Chanoine Cadiou, Doyen du Chapitre, ont été célébrées le mardi 4 mars, à la cathédrale de Quimper, puis à l’église de Plouescat. A ces deux célébrations de nombreux prêtres ont accompagné leur Doyen en sa dernière étape de sa route parmi nous. Dans son homélie. Monseigneur l’Evêque y a évoqué ce que fut cette longue et belle vie de prêtre.

Mes Frères, « Heureux le serviteur que le Maître, à son retour, trouvera en train de veiller… ». Jusqu’à la fin de sa vie, Monsieur le Chanoine Cadiou a été ce serviteur vigilant, attendant le signal du Seigneur. Né le 2 septembre 1886, il a été rappelé à Dieu le 2 mars 1980, à l’âge de 93 ans et demi. A mon arrivée à Quimper, il était déjà depuis 10 ans Doyen du Chapitre Cathédral. Je l’ai connu très respectueux, très digne, très alerte, toujours ponctuel, portant sur les personnes et les événements un regard apaisé, mais lucide. On peut dire qu’il est resté tel jusqu’au bout : il n’y a guère que trois ans qu’il a cessé de conduire sa voiture, et quelques mois qu’il a interrompu sa promenade quotidienne, même s’il en avait un peu raccourci le parcours. Même sur son lit de malade, il demeurait dans le calme et la paix. « J’ai fini ma course, me disait-il. Je suis prêt à partir quand le Bon Dieu voudra ». Il trouvait seulement, les tout derniers jours, qu’il tardait à lui faire signe. Comme de ces justes de l’Ancien Testament, On peut dire qu’il est « mort dans une heureuse vieillesse, à un âge avancé et rassasié de jours ».

Il n’a pas toujours été le vieillard que nous avons connu : il est issu d’une famille et d’un terroir qui l’ont marqué, par leur présence, et plus encore peut-être par leur absence. Il est né à Plouescat, le 2 septembre 1886 et, bien qu’il ait passé à Quimper la plus grande partie de sa vie — 55 ans au moins — et qu’il ait quitté sa petite patrie depuis son entrée au séminaire, à 19 ans, — les vacances étaient bien courtes alors — il est resté très attaché à sa paroisse natale et il a demandé que son corps soit replongé dans la terre originelle pour y jouir de son dernier repos. Son père est décédé en 1895 : Joseph avait alors 9 ans. De sa mère il est dit, sur sa fiche d’entrée au Séminaire, qu’elle était commerçante. Nul doute qu’elle l’ait beaucoup marqué. C’est d’elle sans doute qu’il tenait cette grande délicatesse et cette profonde sensibilité qu’il essayait parfois de masquer sous un langage un peu abrupt Elle devait décéder en 1906, peu de mois après l’entrée de son fils au Séminaire.

Comme élève de l’école paroissiale et comme enfant de chœur, il fut distingué par le clergé de Plouescat et envoyé à Saint-Pol-de-Léon faire ses humanités au Collège de Léon. Sans remettre en question son orientation, il entra au Grand Séminaire de Quimper, aujourd’hui Lycée Chaptal, le 3 octobre 1905. Ils étaient, cette année-là, 43 rentrants. Il fallait pourtant en ce temps-là un certain courage pour s’orienter vers le sacerdoce. Du côté du pouvoir, soufflait un vent très défavorable à l’Eglise : c’est le 9 décembre 1905 qu’était promulguée la Loi de Séparation de l’Eglise et de l’Etat, qui privait l’Eglise de toute reconnaissance juridique et de tout statut légal et ouvrait la douloureuse période des expulsions et des inventaires.

Le Séminaire fut atteint par la tourmente. Le 26 janvier 1907, dès 8 h 30 du matin, toutes les routes qui y conduisaient sont barrées par plus de 200 gendarmes et un bataillon du 118e de ligne, auxquels vint se joindre une compagnie de sapeurs-pompiers avec deux pompes en batterie. A 9 h précises, arrive le Préfet. La foule proteste, des brutalités sont commises, deux manifestants arrêtés. Les portes sont enfoncées. Malgré les protestations, ordre est donné aux responsables et à leurs amis de sortir. Les séminaristes étaient réunis dans la « salle des exercices », récitant le chapelet. Sur leur refus de sortir, énergiquement exprimé à plusieurs reprises, on les prend un à un et on les fait passer entre deux haies de gendarmes jusqu’à la rue où ils continuent leur chapelet que la foule sympathique et émue, récite avec eux…

C’était au temps où les Français ne s’aimaient pas… Pourquoi ce temps n’est-il pas définitivement passé ? Car ces jeunes séminaristes qu’on expulsait aimaient la France, eux, et Monsieur Cadiou, comme tant d’autres, allaient le prouver. Pendant deux ans, de 1907 à 1909, il sert au camp de Châlons, et termine ses deux ans comme sergent-major.

Il reprend alors ses études dans les locaux de fortune, aménagés en séminaire, au Carmel de Brest, avant de revenir à Quimper, rue Verdelet, en 1911. Il est ordonné prêtre le 25 juillet 1912 en cette cathédrale de Saint-Corentin. Il fut alors envoyé, comme surveillant d’abord, puis comme professeur au Petit Séminaire Saint-Vincent qui, après les expulsions de 1907, avait trouvé refuge au Likès. C’est à ce poste qu’il reçut son ordre de mobilisation.

La guerre de 14-18, la « grande guerre », le marqua profondément. Patriote sans panache, il était l’homme du devoir sans réticence. Mobilisé comme officier dans un régiment breton, le 19e d’infanterie, il restait pour ses hommes « Monsieur Cadiou » et non « Mon Lieutenant » car en lui, plus que l’officier ils voyaient le prêtre. Il avait leur confiance, leur admiration, leur affection même, qui les faisait s’écrier quand ils le voyaient s’exposer au danger : « Monsieur Cadiou, vous allez vous faire tuer ! ».

Il passa ces longues années au milieu de la tourmente, aux postes les plus périlleux, fidèle au devoir. De la guerre il rapporta, avec une blessure au bras, cinq citations, la croix de guerre et la Légion d’Honneur. Il rapporta aussi quelques bonnes histoires qu’il racontait avec tant d’humour. A son retour, prévoyant le rôle que pourraient jouer dans l’après-guerre les Anciens Combattants, il accepta la présidence départementale des Prêtres Anciens Combattants dont les interventions furent d’un grand poids pour la défense des libertés lorsque celles-ci furent à nouveau menacées par les vieux démons de la politique, comme en 1905.

Il ne retourna pas à Saint-Vincent. Sans doute le Conseil épiscopal d’alors retrouva-t-il sur sa fiche de séminaire cette note soulignée d’un trait : « Bon organiste », ou bien se souvint-on qu’au temps où il était encore séminariste il avait été envoyé en stage à l’île de Wight pour s’initier au grégorien près des Pères Bénédictins de Solesmes : il fut nommé vicaire à Saint-Corentin, le 10 avril 1919. Il devait y demeurer 20 ans.

Maître de Chapelle, il fut l’homme de la liturgie, de la musique et du chant. La Cathédrale lui doit en particulier son orgue de chœur qui accompagne aujourd’hui les chants de ses obsèques, et dont on envisage la restauration… à son grand étonnement d’ailleurs, car il disait tout récemment à un ami : « Cet orgue est tout neuf : c’est moi qui l’ai installé ». C’est bien vrai, mais il y a 50 ans de cela ! Tandis que certains de ses confrères, comme Monsieur Le Goasguen ou Monsieur Hervé, par exemple, étaient plus spécialement les vicaires « chargés des œuvres de jeunesse », il fut, dans l’équipe, celui qui porta particulièrement le souci des vocations sacerdotales, religieuses et missionnaires, et de l’imposant groupe d’enfants de chœur qu’il avait formé, comme des jeunes filles qui s’adressaient à lui en confession, surgirent des vocations éprouvées. Beaucoup de ceux ou celles qui lui doivent l’orientation de leur vie vers le service du Seigneur et de l’Église lui sont demeurés profondément attachés.

Il prenait aussi, bien sûr, sa part du ministère ordinaire de la paroisse et, par là, se préparait à d’autres responsabilités. En avril 1939, il était nommé Recteur de Guissény, d’où, trois ans plus tard, il était transféré à Plabennec comme curé-Doyen. Trop rapides passages, au gré des paroissiens, qui n’eurent guère que le temps d’apprécier sa bonté et sa fermeté, son sens de l’accueil et son souci de disponibilité, dans un style de ministère moins dispersé qu’aujourd’hui, plus préoccupé sans doute, comme on dirait en langage moderne, de sacramentalisation que d’évangélisation, mais sans jamais opposer l’une à l’autre.

Pour ses qualités de pasteur st pour ses bonnes relations avec les prêtres, il fut appelé par Monseigneur Duparc à la charge de Vicaire général. C’était l’époque où la prise en charge apostolique ne se mesurait pas en kilomètres au Compteur de la voiture ni au nombre de réunions par semaine. Responsabilité d’administration plus que de pastorale, au sens où nous l’entendons aujourd’hui. Monsieur Cadiou se trouvait à l’aise en cette fonction de service. Sous l’autorité et la responsabilité de « Mgr l’Evêque », auquel il se référait toujours dans l’exercice de ses principales responsabilités, par sens de l’obéissance, peut-être aussi un peu pour se couvrir, car c’était un timide, il recevait visites et consultations avec bienveillance. Il répondait le jour même, de sa belle écriture si finement moulée, à toutes les lettres qu’il recevait, et vérifiait minutieusement tous les comptes et registres.

Il était lui-même d’une régularité exemplaire. Levé tous les matins à 6 h, pour avoir le temps de vaquer à la prière (oraison, bréviaire, messe). Il était à son bureau, à l’Évêché de 9 h à midi, puis de 14 h à 17 h. Au retour, il passait à la Cathédrale pour un nouveau temps de prière, puis rentrait chez lui : les dernières heures de la journée étaient son temps personnel, consacré à l’étude, ou à la lecture ou à quelque autre travail qu’il avait entrepris. Il se couchait tôt, pour reprendre le lendemain le même rythme, sauf les jours où il devait accompagner son évêque en quelque tournée pastorale. Avec les prêtres, il était à l’aise, les accueillant volontiers à sa table, comme il fréquentait avec joie les presbytères amis, les dimanches où il était libre. Mais quand il s’agissait de l’application des consignes diocésaines, il était d’une fermeté et même d’une certaine rigueur qu’explique sa timidité, dont témoigne aussi un certain besoin d’abriter ses décisions d’une référence à l’autorité supérieure : « Que veux-tu, mon cher ami, c’est la volonté de Monseigneur ! ». Quitte à donner ensuite libre cours à sa sensibilité, près de ses amis, après une intervention particulièrement pénible : « Je l’ai vu pleurer plus d’une fois », me disait l’un de ceux-là.

Il portait aussi le souci de la vie religieuse et telle congrégation qui l’avait pour « Supérieur ecclésiastique » se souvient de son dévouement et de son attachement Avec les laïcs, il était moine à Taisé. Il n’était pas l’homme des réunions ou des sessions qu’il trouvait toujours trop longues, quoiqu’il y participât par devoir. On évoque encore volontiers l’accueil réservé à telle ou telle délégation venue réclamer à l’évêché au sujet d’une nomination ou d’une délimitation de paroisses. C’était l’homme d’une pastorale pour son temps. Et dans cette responsabilité il fut un prêtre heureux, serein, épanoui.

Après Mgr Duparc, Mgr Fauvel (qui m’a dit son grand regret de ne pouvoir être présent à cette célébration, pour des raisons de santé) a profité pendant 10 ans de ses loyaux services. En 1958, il lui proposa d’accepter la dignité de Doyen du Chapitre Cathédral : il avait alors 72 ans. A sa manière à lui, qui ignora toujours retard ou refus, il accepta. Depuis 22 ans, il a rempli cette charge, tant que ses forces le lui ont permis, bien conscient que la prière de louange et d’intercession pour le diocèse était encore un ministère. Il était moins mêlé à la vie du diocèse, alors en pleine évolution, mais pour beaucoup de prêtres il demeurait une référence, par la dignité de sa vie et le rayonnement de sa personnalité sacerdotale.

S’il fallait résumer d’un mot l’ambition de sa vie, je lui donnerais volontiers comme devise « Servir l’Eglise ». Oui, il a été un de ces bons serviteurs dont parlait tout à l’heure l’Évangile, toujours « en tenue de service et sa lampe allumée à la main », toujours prêt à aller là où le Maître l’enverrait, prêt aussi à lui ouvrir au jour où il frapperait à la porte.

Et le secret de son obéissance, de la liberté dans le service, de cette sérénité dont il a fait preuve jusqu’en sa dernière maladie, c’était sa foi en l’amour prévenant du Père. Il redisait avec saint Paul : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? J’en ai la certitude : rien ne pourra nous séparer de l’amour que Dieu a pour nous et dont il nous a donné la preuve en Jésus-Christ Notre Seigneur ». Au jour de son ordination, quand l’Archidiacre le présenta à l’Evêque pour l’ordination sacerdotale, l’Évêque posa la question rituelle : « Savez-vous s’il en est digne ? ». Alors qu’a pris fin sa longue vie sacerdotale, il me semble qu’en présence du peuple chrétien on peut répondre — autant que le permet l’humaine faiblesse — avec plus d’assurance que l’Archidiacre : « Oui, il s’est montré digne de la fonction et de la mission qui lui ont été confiées »…

04 . Auguste LESPAGNOL, recteur de Guissény (1942-1947)

Auguste LESPAGNOL devient recteur de Guissény en 1942 à la suite de Joseph Cadiou

Auguste LESPAGNOL est né le 29 avril 1889 à Run ar Chang en Lanvéoc, fils de Jean François Lespagnol, batelier, et Marie Yvonne LESCOP.

. Le 25 juillet 1921 : ordonné prêtre à la cathédrale de Saint-Corentin à Quimper

. Le 16 septembre 1921, il est nommé vicaire à Locmaria-Plouzané

. En 1923, il est nommé vicaire aux Carmes de Brest

. En 1942, il devient recteur de Guissény

. En 1947, il est nommé curé doyen de Châteauneuf-du-Faou

. En 1949, il est nommé chanoine honoraire

. En 1950, il est curé archiprêtre de Quimperlé

. En 1957, il est nommé chanoine titulaire

. Il est décédé le 1er décembre 1957 à Quimper

A.Lespagnol+1957

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La Carrière militaire d’Auguste Marie LESPAGNOL (registre matricule : classe 1909, n° 84 à Brest)

Fiche matricule

. incorporé au 132e Régiment d’Infanterie le 9 octobre 1911

. arrivé au corps le dit jour (n° matricule : 4924) : soldat de 2e classe

. envoyé en congé le 25 septembre 1913 (Certificat de bonne conduite accordé)

Guerre 1914-1918 : . rappelé à l’activité par décret de mobilisation générale du 1er août 1914

. arrivé au corps le 3 août 1914 et parti aux armées le 8 août 1914

. passé caporal le 30 août 1914

. blessé à Lénnarhée par balle à la cheville gauche évacué le 7 septembre 1914

. rentré au dépôt le 25 octobre 1914 et nommé sergent le 5 janvier 1915

. parti en renfort le 12 mai 1915

. passé adjudant de bataillon le 15 septembre 1915 et sous-lieutenant de réserve à titre temporaire à dater du 10 octobre 1915 (décision du général en chef du 15 septembre 1915)

. blessé à Douaumont évacué sur l’intérieur le 8 avril 1916 : fracture du tibia et du péroné gauche

. rentré au dépôt le 20 novembre 1916 et rejoint les armées le 8 janvier 1917

. passé au 129e Régiment d’Infanterie le 12 septembre 1917

. promu lieutenant de réserve à titre temporaire (décision ministérielle du 28 décembre 1917)

. passé au 369e Régiment d’Infanterie le 6 juin 1918

. blessé le 11 août 1918 à Machemont par éclat d’obus : plaie au coude droit

. promu sous-lieutenant à titre définitif par décret du 22 octobre 1918 pour prendre rang du 25 septembre 1918, puis lieutenant de réserve (à T.D.) à compter du 31 août 1918

. passé au 7e Régiment d’Infanterie suite à la dissolution du 369e R.I. (4 avril 1919)

Citations  :

  • cité à l’ordre du Corps d’Armée (n° 117) le 3 février 1916 : « Parti comme soldat de 2e classe, s’est magnifiquement conduit à Maissin le 22 août 1914 où sous un feu d’artillerie et d’Infanterie extrêmement violent, il a ramené au combat une trentaine d’hommes isolés, les a énergiquement maintenus sur une position de première importance qu’il n’a voulu évacuer qu’après en avoir reçu l’ordre formel. A été blessé le 7 septembre à Lénnarhée , est revenu sur le front à peine guéri, s’est particulièrement distingué pendant les attaques du 25 septembre au 8 octobre 1915 où comme chef de section, il a déployé de grandes qualités de coup d’œil, de courage et de sang-froid  ».
  • cité à l’ordre de l’armée du 29 juin 1918 (J.O. du 27 août 1918) : «  A l’attaque du 11 juin 1918 a brillamment enlevé sa section et fait prisonnier un sergent major ennemi ».
  • cité à l’ordre de la brigade (n° 119) du 30 août 1918 : « Officier très brave. Le 11 août 1918 a entraîné vigoureusement sa section, a atteint son objectif. Blessé au cours de l’action ».

décorations  :

  • Croix de Guerre avec étoile de bronze, et étoile de vermeil et palme
  • Chevalier de la Légion d’Honneur (rang du 16 juin 1920 – J.O. du 4 septembre 1920) : « officier d’une haute valeur morale, animé du plus noble esprit de sacrifice, des plus purs sentiments de dévouement et d’abnégation, gagnant le cœur de ses hommes par sa belle bravoure ».
Légion d’Honneur

. mis en congé illimité de démobilisation le 4 août 1919 : conserve le bénéfice de la double campagne au-delà de ses services effectifs pendant une année complète à partir du jour de sa blessure en l’espèce jusqu’au 10 août 1919.

. se retire à Lanvéoc (Finistère)

. proposé pour maintien dans les cadres, pension permanente 10% par la Commission de réforme de Brest du 29 avril 1922 pour « séquelles de fracture de la jambe gauche, 1/3 infirmité : incurvation, raccourcissement, amyotrophie légère – Raideur du coup de pied ».

Guerre 1939-1945 :

. rappelé à l’activité le 23 août 1939 : affecté au H°/248 D.I., 1re Compagnie F.V.

. arrivé au corps le 24 août 1939

. démobilisé par la Brigade de gendarmerie de Brest le 11 octobre 1940 pour compter du 25 juin 1940 (non prisonnier).

. proposé à la radiation des Cadres par la Commission de réforme de Brest du 10 avril 1940.

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